A la mémoire de Yéma, (1940-2011)

 

 

الله يرحمها ويغفر لها ويسكنها فسيح جناته ويجعل قبرها روضة من رياض  الجنة

 

Le mois de septembre, le jour de dimanche 17 de l'année 1961, j'ai vu le jour. Mon prénom Ali, en mémoire à mon arrière grand-père maternelle, me fût attribué.

Très vite un surnom est venu s'accroché à ma personne. Arliouette.

 

Mes premières années, l'insouciance de l'enfance, fûrent paisibles. J'étais scolarisé dans une école de langue arabe, jusqu'à l'âge de 8 ans, l'année 1969 fût l'année de notre migration vers la France.

 

Arrivés à Rouen, le début du mois de novembre, nous restâmes quelques jours chez ma tante Aïcha et mon oncle Labed (paix à son âme), ensuite béba nous trouva un logement hlm à Maromme (Seine-maritime). 

 

J'entre en classe, en CE1, avec un lourd handicap, je ne connaissais pas la langue française. 

Une voisine de palier, Mme Michèle, nous prît sous son aile de protection et nous aida grandement à acquérir les bases de la langue française. Nous avons appris, avec mon frère et mes deux soeurs l'alphabet française, et commencions à communiquer en cette langue.

Merci, Mme Michèle, Allah vous protège et vous fait entrer dans son vaste paradis.

 

 

Le 15 juillet, la nuit du 14 à 15 juillet 2011, un appel vers 00:30, un appel de ma soeur Nora, nous informant du décès de Yéma, nous étions à Marseille.

Vers 1:15, du 15 juillet 2011, nous prîmes la route vers Lyon.

Mon épouse, ma moitié musulmane, appela Tawfik, mon beau-frère, afin qu'il m'accompagne à l'aéroport de Saint-Exupéry à 5:30 du matin.

Arrivée à 8:30 à Alger, j'étais effaré, déconfit, voire plus dans cette réalité quotidienne,faite d'habitudes nocives. Je venais de perdre Yema. Un cauchemar en réalité, très angoissant, anxiété et regrets s'installent, et aussitôt la voix de Yema, s'amplifiant dans ma tête, me disant en arabe et dont voici la traduction en français; Ali, ne pleure pas, te voici face à la terrible réalité de la destiné de chacun de nous. Garde espoir en Allah. 

Le jour de la mise en terre de Yema, Belkacem, mon cousin germain, s'approchât de moi et me dit dans un excellent français;" Ali, tu descents dans la tombe de Khalti ZOHOUR avec moi."

Ma réaction fût démesurée, voire violente. Je m'emporte contre lui et lui exprime mon refus d'exécuter cette tâche qui me paraissait un ravin infranchissable.

Il me demanda de me calmer et de rester serin, et que tout allait bien se passer, Belkacem m'informa comment on allait procéder, et la sérénité s'installât.

 

Je retirais mes sandales, descendais sous terre,et avec mon cousin Belkacem recevions le corps de Yema, j'étais spirituellement dans une dimension sans temps, j'étais comme ivre, euphorique en même temps, une impression d'une intense sakina et d'un bonheur complet.

Je remontais du lieu éternel de repos du corps de Yéma et j'étais en nage, mon corps était en sueur.

Un vieux monsieur, souriant, cheveux blanc, très lumineux même rayonnant, me questionna en algérien; c'est ta maman?

Je répondis par l'affirmative.

Il me donna comme conseil d'acheter une climatisation et de l'offrir à la mosquée de mon quartier, et de revenir vers le dîne, tu as une grande tâche à accomplir dans ce bas-monde, je me tourne un instant pour chercher de l'aide, et, dès que je me retourne à nouveau vers mon interlocuteur, il a disparut. Je cherche de mes yeux ce curieux personnage, impossible de le retrouver.

Mon ami l'imam Nordîne, reçu mon don avec beaucoup de joie, me remercia, et fit des doûas pour Yema, et le vendredi; lors du prêche, il n'oubliât pas de rappeler et d'évoquer ma famille et ses oeuvres.

 

Pendant plusieurs mois, j'étais dans un état second, ayant perdu le gout de vivre et surtout je n'avais pas oublié Yéma.

Je me suis mis à tricoter, car Yema, lors de notre petite enfance, pour activité à la maison, nous apprenais à tricoter ou bien coudre.

 

 

Les paroles de mon employeur, La Boutonnerie Lyonnaise, dont son gérant est M. Dominique A., me réconfortèrent et en même temps, me donnèrent le courage de demander à prier sur le lieu de travail, ce qui me fût accordé.

Ce n'était pas facile, il y a eu quelques réflexions, de l'animosité, voire un rejet de ma personne par certains collègues.

 

Les pensées affluèrent comme un torrent dévalant une vallée, violent et tumultueux.

 

A l'aube de 2013, la rencontre avec M. David K., maire élu du quatrième arrondissement et président de la Métropole, me permit avec deux frères; Hamoudi A. et Youcef B., de créer une association régie selon la loi de 1901, association culturelle, qui par la suite enseignât la langue arabe aux enfants dès six ans et aussi dès décembre 2020, les cours pour adultes furent programmés.

 

Atelier de découpage

atelier de mandala islamique

juin 2021

 

L'année 2014, fût l'année du retour vers les sources, et ceci afin de comprendre ce qui m'arrivais. Donc je décidais de me rendre en premier lieu sur la région d'origine de mon père Lakhdar, et, avec mon cousin Mouloud, nous nous rendions à Chelalat Al Adhaouarat, daïra de la wilaya de Médéa.

Avant de nous rendre chez la soeur de mon papa; Taije(couronne), je demandais à mon cousin de se rendre à Kef Lakhdar le lieu de mon passage lors de mon service national.(deux ans du service militaire à 6ième GTF 2ième S/G),

 

Entrée du Kef Lakhdar 2014

 

j'avais dans mon sac à dos, une précieuse marchandise; dans un tupperware, une vingtaine de noyaux de châtaigne. de très belles châtaignes de l'Ardèche. L'objectif; les planter sur la montagne de Kef Lakhdar. Le climat est propice à une éventuelle plantation et viabilité de l'espèce Castanea sativa. Très nutritive, la châtaigne est un excellent fruit et aliment.
Sur la route serpentueuse qui mène à Kef Lakhdar, je demandais à Mouloud de s'arrêter sur la route, là où il y aurait des personnes, afin de demander des informations sur les prix des terrains constructibles et aussi de la disponibilité de maisons à vendre.

 

une pluie salvatrice s'annonce à l'horizon

KEF LAKHDAR

Daïra Aïn Boucif

Wilaya Médéa

2014

 

Nous rencontrâmes un groupe de personnes discutant paisiblement devant un petite bâtisse au premier  tiers de sa construction.

Mouloud garât la voiture sur le bas côté de la route, et, une fois sorti du véhicule nous échangeâmes les salutations tradionnelles islamiques, Essalem alaykom oua rahmatoullah, formule de paix et de miséricorde envers les personnes rencontrées sur notre passage.

Mouloud discutait avec les personnes, je ne comprenais pas tout, quand à l'instant un homme vêtu d'une manière très élégante et noble, je sentais que cet individu était une personalité locale, une personne ayant de l'influence et de l'autorité sur le peuple du coin, nous salua.

 

Une fois les présentations accomplî, Messaoud A., ce noble personnage nous invitât à un thé matinal, il était encore très tôt, environ huit heures quarante cinq minutes, je déclinais par politesse, ne souhaitant pas les déranger, Mouloud m'expliquait que dans cette contrée algérienne et aussi dans toutes les régions musulmanes la tradition de l'hôspitalité était sacrée, et que refuser c'était offenser les hôtes, le Prophète

اللهم صلّ و سلام  على سيدنا و حبيبنا و

نبينا محمد رسول الله

 et Allah.

 

Une merveilleuse découverte, j'avais oublié combien les arabes étaient bons et justes et aussi respectueux envers les étrangers, étranger? Pas tant que cela.  Je compris que j'avais manqué l'essentiel de la culture arabo-musulmane, et que je devais apprendre à être humble. L'humilité dont sont maître les arabes, me stupéfia et me réconforta, je compris dès lors, que le travail sur soi devait être la règle principale pour obtenir un résultat convaincant et durable, pour me permettre d'avancer sur la voie des pieux prédécesseurs.

 

Le bâtiment en construction est une mosquée

 

Nous étions bien installé dans le patio, entouré de fleurs et d'abeilles butinants ces jolis trésors de boutons multicouleurs. Nous discutions paisiblement, le temps s'est arrêté, et je ressentis de l'impatience, je regardais l'heure sur le téléphone portable et je constatais que nous étions là depuis deux heures, je faisais remarqué à Mouloud qu'il fallait partir pour avoir le temps de faire ce que nous avions projeté la veille au soir.

 

Messaoud, remarqua mon bouillonnement intérieur, et nous invita à le suivre.

 

Nous entrions dans une bâtisse faite de pailles et de boue, une forme de pisé, et j'étais impressionné par le luxueux intérieur, très confortable et des plus moderne, une longue table de près de quatre mètres de long, avec dessus des mets forts appétissants, du couscous, de la soupe (chorba) un très grand plateaux avec plusieurs sortes de viandes, diverses entrées, du miel, du jben (fromage blanc), du lben, du raïb, diverses boissons, et une multitude de fruit, trois sortes de pains traditionnels arabe (msemen, matlou', kesra). Une table digne d'un roi.

 

Je compris bien plus tard, ce que cela signifiait, le retour du fils du pays. Ali fils de Lakhdar, fils de El Ouanoughi, fils de Dhif, fils de Amar <=500ans=> cheikh Amar.

 

Le repas terminé, les remerciements effectués avec congratulations, nous allions nous séparer, et je n'avais pas de cadeau à donner à mes hôtes, quand l'image des noyaux de châtaignes émergea dans mon esprit. J'ouvrais mon sac, pris le tupperware, l'ouvrît et plongeât ma main, remettant mon butin entre les mains de Messaoud, je lui dit; "plante ces noyaux de châtaignes, auquel cas nous n'en mangerons pas, nos enfants en mangeront incha ALLAH".

 

Sidi M'hamed

à Kef Lakhdar

De retour à Lyon, je vaquai à mes occupations, ayant repris mon poste de teinturier coloriste au sein de la Boutonnerie Lyonnaise, M. Dominique A. ne tardât pas dès le début de la matinée à venir me saluer. Un homme fort respectable, et altruiste, il me sauva de l'enfer du surendettement quelques années plus tôt, une première dans ma vie, à ce jour, mis à part mes parents et ma tante Aïcha, personne ne m'a tendu la main sur le plan financier.

 

M. Dominque A., s'aperçoit à chaque retour de mon pèlerinage en Algérie, du changement et ne manque pas de le faire remarquer. 

 

Vers le début de décembre, un appel provenant de chez mon oncle paternel Slimane, me laissa un peu désorienté, d'abord il me dit en algérien et dont voici la traduction en français " Oh le marabout, qu'as tu fais en Algérie, le peuple de Aïn BOUCIF et ses environs ne parle que de toi. Et le Cheikh BENAÏCHA veut te rencontrer. "

 

Je lui répondit avec mon algérien d'un enfant de huit ans, que je ne comprends pas de quoi il parle, et je ne pense pas avoir fait quelque chose de mal.

 

Il m'explique, que le geste du don des noyaux de châtaignes, n'était pas passé inaperçu, et les paroles dites à l'Imam MESSAOUD A. n'étaient pas anodines.

Messaoud A. connaissait ma famille d'où je suis issu, et il s'en ai gardé de me le dire lors de notre première rencontre.

 

Je demandais à mon oncle qui était le cheikh BENAÏCHA (maître soufi), il me répondit que c'était le cheikh dépositaire de l'histoire de la famille et de ses membres. Et qu'il souhaitait me rencontrer afin de voir qui était Ali BENAYACHE.

 

Me voici de retour en Algérie, guidé par ALLAH, ne forçant pas le destin, je retrouve les maillons manquants à la chaine de l'histoire de mes ancêtres.

 

Le Cheikh BENAÏCHA m'accueilllit avec le sourire, me fit introduire dans la zaouïa, que je saluais avec le salem et la miséricorde d'ALLAH, après quelques minutes d'échanges de formalités et de courtoisie, je demandais à me rafraichir, le Cheikh me demanda de le suivre, et je l'accompagnait dans sa villa, il me donna un nécessaire de toilette et m'indiqua la salle de bain, dont l'intérieur est composée d'un évier, d'un bidet, d'une douche italienne et d'un lave-linge.

A mon retour à la zaouïa, je ne manquai d'effectuer deux rakk'a, afin

de saluer le lieu; la zaouïa.

 

Le Cheikh me demanda quelle prière j'effectuai, et je lui expliquai que c'est la prière de la salutation du lieu d'accueil.

CELUI QUI PLANTE UN ARBRE, AURA UNE AUMÔNE POUR TOUT FRUIT MANGÉ OU MÊME VOLÉ.